programmation culturelle

Fiction radiophonique : “Lou et le mystère du cycle doux” – Écoute collective

Sur le mode de la fiction radiophonique, ce podcast interroge joyeusement nos rapports à la machine à laver et, plus largement, aux objets techniques. Et des objets techniques, les collections du musée de La Fonderie en regorgent ! Objets destinés à la fabrication ou objets à usage domestique, ils disent quelque chose de l’évolution de la place prise par la technologie dans notre société depuis la révolution industrielle. Ils révèlent aussi l’utilisation de la technologie pour créer des besoins inutiles et nous faire consommer toujours plus.

Comme une évidence, Mathilde Schoenauer Sebag a donc choisi La Fonderie pour présenter en première écoute son podcast qui aborde ces sujets avec subtilité et humour. Au creux d’un dimanche après-midi de décembre, nous nous poserons confortablement dans le musée, oreilles tendues et estomacs repus par un bon goûter, pour écouter… écouter et s’abandonner aux programmes inutiles des machines à laver.

 

Pitch

Lou est une jeune femme rationnelle et habituée à ce que les choses aient un sens. Alors quand elle se rend compte que la plupart des gens n’utilisent pas les programmes de leur machine à laver, elle ouvre l’enquête et entame une mission qui va la dépasser.

Au centre d’archives, elle met la main sur le premier programme inutile jamais inventé, le cycle doux, imaginé par Lucien Grenat. Un personnage sibyllin, mi-standardiste, mi-archiviste, lui fait comprendre qu’il faut empêcher à tout prix l’invention du cycle doux car il est le premier élément d’une chaîne causale menant à la chute de l’humanité. Lou entame alors un voyage temporel pour tenter de convaincre Lucien d’abandonner son invention. Mais la fiction finit par prendre possession des personnages et les voici tous deux éjectés dans un futur gentiment foutoir où l’on assiste à une course de machines à laver.

 

Programme

14h : accueil dans le musée

14h30 : écoute de 2 épisodes
Épisode 1 : Les cartes électroniques meurent aussi
Épisode 2 : Le cristal zéro

15h10 : entracte
Un temps pour déambuler dans le musée et prendre un goûter à la cafétéria

15h40 : écoute de 2 épisodes
Épisode 3 : Rencontre du troisième cycle
Épisode 4 : À tambour battant

16h30 : fin de l’écoute
Un temps pour échanger, papoter… ou boire un verre

17h15 : fermeture du musée

 

Pourquoi cette fiction ? par Mathilde Schoenauer Sebag

La fourchette n’a pas évolué depuis des siècles. Le jour où elle a enfin rempli toutes les fonctions pour lesquelles elle avait été imaginée, elle a arrêté d’évoluer. Pourquoi ceci n’a-t-il pas été le cas pour la machine à laver ? Aurait-il pu en être autrement ?

Lou et le mystère du cycle doux est une fiction radiophonique en quatre épisodes qui part de cette interrogation somme toute innocente, mais qui mobilise malgré tout une certaine frustration de se voir imposer des innovations qui n’ont pourtant aucune utilité. Ces questions ont fini par enfler jusqu’à donner 1h40 de tergiversations sur la machine à laver.

Dans cette utopie radiophonique, je suis donc partie de la machine à laver comme symbole de l’objet utile devenu gadget. Objet qui améliore réellement le quotidien, mais progressivement emberlificoté dans des innovations inutiles. Par inutile, j’entends “qui ne diminue pas la pénibilité du travail physique”, “qui ne correspond à aucun désir ou besoin préexistant”. Mon propos n’est pas technophobe, il vise à décaler avec humour nos rapports aux objets techniques et à poser les bases d’un débat collectif autour de la définition de nos besoins.

Cette fiction radiophonique permet également de mettre en exergue le pouvoir de la fiction en tant qu’outil révolutionnaire et outil de soin. C’est le second propos qui est tenu ici, en filigrane. Révolutionnaire, parce que l’on peut modifier un élément du passé, infléchir la courbe temporelle, esquisser les contours d’un futur souhaitable. Et malgré l’aspect fictionnel de ces modifications, se figurer un futur fait partie des façons de le rendre plus probable (1). C’est en portant notre attention sur un futur qui doit exister, en se posant les questions collectivement, en imaginant, fantasmant, que quelque chose opère en nous. L’horizon bouché se retrouve parcouru par de tremblantes lignes de fuite, qui se mutent en lignes de désir (2). La fiction est également un outil de soin, parce que rendre visite au passé permet un certain apaisement. Les schémas simplistes s’écroulent, libérant un espace pour convertir le ressentiment, l’amertume et l’impuissance en énergie mobilisante et joyeuse.

(1) Je recherche une forme d’efficacité symbolique comme l’entend Claude Levi Strauss, faisant référence au pouvoir des symboles et des mises en récits sur nos vies.
(2) Je souhaite ici renverser l’actuelle tendance à inonder nos imaginaires de dystopies, quoiqu’elles aient un grand pouvoir d’alerte – c’est la voie prise par exemple par Benjamin Abitan dans La préhistoire du futur. Le parti pris ici a été au contraire de rechercher des univers réalistes comme ceux que l’on peut retrouver dans Bâtir aussi, recueil de fictions spéculatives écrites par le collectif de l’Antémonde.

Remerciements
Constant, Leslie, Maxime, Miguel, Anass, Michèle, François Jarrige, Razmig Keucheyan, Gil Bartholeyns, André Gorz, Quynh Delaunay, Manuel Charpy, Ivan Illitch, Anna Barseghian, Thierry Weil, Victor Focquet, Mehdi Bayad, Amélia Nanni, Chahid Bestrioui et la machine à laver de Marie dont le filtre anti-parasite a fait les frais de mon amateurisme.

Bibliographie
1893 L’âge de l’ersatz – William Morris
1926 L’idéal du cassé – Alfred Sohn Rethel
1958 Du mode d’existence des objets techniques – Gilbert Simondon
1966 « Je suis sincère avec moi-même » et autres lieux communs : La machine est un objet neutre dont l’homme est le maître – Jacques Ellul
1972 Test Achats – Archives – Bibliothèque royale de Belgique
1972 Marie Claire Maison – Archives – Bibliothèque royale de Belgique
1981 Autopsie d’une machine à laver – Yves Stourdzé / https://www.cairn.info/revue-le-debat-1981-10-page-15.htm
1994 La machine à laver en France. Un objet technique qui parle des femmes – Quynh Delaunay
2016 Negotiating with the future : incorporating imaginary future generations into negotiations, – Yoshio Kamijo, Asuka Komiya, Nobuhiro Mifune et Tatsuyoshi Saijo
2019 Les besoins artificiels – Razmig Keucheyan
2021 What do people say when they become « future people » ? Positioning Imaginary Future Generations (IFGs) in General Rules for Good Decision Making – Toshiaki Hiromitsy, Yoko Kitakaji, Keishiro Hara et Tatsuyoshi Saijo
2021 L’étrange et folle aventure du grille-pain, de la machine à coudre et des gens qui s’en servent – Gil Bartholeyns et Manuel Charpy
2022 Devenir futurier – Yoann Moreau / https://www.utopiana.art/en/devenir-futurier

Références sonores
1991 Leapday night – David Behrman
2016 Ultimate Care II – Matmose panneau latéral
2018 Bâtir aussi – Les ateliers de l’Antémonde
2019 La préhistoire du futur – Benjamin Abitan, France Culture
2021 Rouge vif – Mehdi Bayad

    date(s) et heure(s)

date de début
15/12/2024

durée
14h à 17h15

lieu de rendez-vous
La Fonderie - Musée bruxellois des industries et du travail
rue Ransfort 27
1080 Bruxelles

tarif(s) - prix
Gratuit

auteur(s)
Crédits
Réalisation, écriture, montage, jeu : Mathilde Schoenauer Sebag
Prise de son : Aurélien Lebourg
Aide au montage : Jennifer Cousin
Mixage : Vincent Venet
Voix : Anass Mbouombouo, Mathis Hans, Audrey Esnault, Chahid Bestrioui, Maxime Gridelet, Théo Girin, Pilou Crapou, Noémie Lhoir, Hugo de Westelinck, Alexia Falisse, Polo Ricardo et des personnes ayant des avis sur les machines à laver
Aide à l’écriture : Sebastian Dicenaire, Martin Ronceray, Mathis Hans
Aide au bruitage : Miguel Rudolf-Cibien
Musique : Matmos, Ilpo Numminen, Humbros
Illustrations : Henri Verdreau

Production : Transcultures et Utopiana

Avec le soutien de la création radiophonique de la fédération Wallonie Bruxelles et du Fonds Gulliver.

La création est inspirée par le concept de Future Design développé par Tatsuyoshi Saijo et transmis par Yoann Moreau.

contact
La Fonderie
reservation@lafonderie.be – 02 410 99 50

Mathilde Schoenauer Sebag
https://www.instagram.com/duu.din.ka/
https://www.facebook.com/duudinkaa
https://soundcloud.com/duudinka
sound@duudinka.com

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